DOCUMENTAIRE – EN DÉVELOPPEMENT
Je découvre l’existence de près de 15000 caméras de surveillance dans ma ville natale Oufa, en Russie. Des images live accessibles 24h/24 sur internet. Coincée dans ma chambre en France et ne pouvant pas rentrer chez moi, je parcours la ville depuis mon ordinateur. Je peux aller partout : attendre aux arrêts de bus, longer les rues, entrer dans les cours d’immeubles, observer les chantiers, me promener dans les parcs, monter sur les toits. Les membres de ma famille apparaissent devant une des caméras, accrochée en hauteur dans le parc. Ils s’arrêtent, la pointent des doigts. Ils me transmettent un bonjour, secouant leurs mains. Puis s’en vont, disparaissant du cadre. J’essaie de les retrouver avec d’autres caméras. En vain. Les caméras ne sont pas disponibles partout. Les saisons changent et transforment la ville. Je continue à y errer, obsédée par l’idée de les revoir. Leurs voix lointaines me donnent régulièrement des nouvelles au téléphone. La nuit, le jour. Les fêtes, les manifestations. La guerre. Une tempête de neige et j’ai froid. J’attends aux arrêts de bus. Les gens sautillent en rythme, vérifiant l’heure. Ils essaient de rentrer chez eux mais le bus n’arrive toujours pas. Je suis un intrus silencieux, personne ne sait que je les observe. J’essaie de deviner de quoi ils parlent, reproduire les bruits de cette ville silencieuse. Je suis suspendue à un lampadaire, à un immeuble soviétique, à un arbre. Et je reste là, avec eux. Sentez-vous ma présence ?
Avec le soutien de la SCAM – Brouillon d’un Rêve et du CNC (FAIA)